Il y a quelques temps, j’accompagnais une femme en cure de Rêve Eveillé Libre, rongée par la culpabilité. Victime de viol dans sa jeunesse, elle se sentait encore coupable de ce qui lui était arrivé. Nous avons travaillé ensemble sur cette culpabilité et maintenant grâce à la thérapie et notamment grâce aux rêves, elle a pu enfin s’en défaire et repartir vivre sa vie.
La culpabilité est une des composantes importantes de la thérapie. Comment naît-elle ? D’où provient-elle ? Comment s’en défaire ? Voici quelques éléments de réponses.
Sommaire
Comment définir la culpabilité ?
La culpabilité est un sentiment complexe qui naît d’une situation dont la personne se sent responsable. Elle est souvent liée à la honte ou encore au regret. Elle est l’illustration de sa faiblesse à n’avoir pas su comment bien réagir face à une situation qui la mettait en porte-à-faux. Elle est l’illustration de son impuissance face à une menace extérieure qui la touche elle, ou une autre personne. On pourrait donner tant de définitions à la culpabilité. Elle est d’ailleurs l’origine de bien des névroses. Combien de gens portant le poids de leur culpabilité, tombent dans la dépression ? Un mot que la personne aurait voulu dire et qui aurait tout arrangé, un événement qu’elle a laissé faire alors qu’elle en connaissait déjà la conclusion. C’est un poids qui assomme, qui oppresse, qui empêche.
Elle est aussi un garde fou , elle nous empêche d’avoir des réactions négatives ou inappropriées face aux personnes avec qui nous sommes en contact. En ce sens, elle est un lien avec nos valeurs et plus généralement avec la morale et la loi.
Comment naît-elle ?
Dans l’exemple de cette femme suivie en thérapie, la culpabilité est née de cette impuissance à exprimer le moindre véritable désir suite au traumatisme qu’elle a subi. C’est comme si elle s’était enfermée dans cette faute qu’elle n’a pas commise et on voit comment son Moi est fractionné entre ces pulsions de vie et de mort. Mort de ce qui a été volé, arraché, perdu et en même temps la volonté farouche de vouloir continuer à aimer et à être aimée.
Comment s’en défaire ?
Se sentir coupable nous empêche de voir qui nous sommes vraiment et de voir notre potentiel. Nous ne nous voyons qu’à travers l’autre, ce qui nous amène à ne voir que nos propres manques, par rapport à l’autre. Prendre du recul sur la situation permet de rétablir la position de chacun avec ses qualités et ses limites. Pour se faire, voici quelques pistes de travail que vous pouvez appliquer vous-même ou accompagné de votre thérapeute :
- Analyser froidement la situation qui a déclenché cette culpabilité.
- Vient ensuite le questionnement par rapport à ce qui a été mal fait, l’impact associé (retentissement)
- Se questionner sur ce qu’il est éventuellement possible de faire pour réparer le préjudice.
- Se questionner sur ses propres valeurs et comment elles ont été bafouées dans cette situation.
- Se demander si dans d’autres situations, ces valeurs ont été respectées et de quelle manière.
- Se réaligner sur ses valeurs et se demander dans quelle mesure la barre n’a pas été mise trop haute.
Le Rêve Eveillé Libre aidera en plus à vous libérer des complexes de castrations et d’Œdipe souvent mal résolus. Les symboles et les archétypes permettent à l’inconscient de dissiper les angoisses liées à ces complexes. C’est la grande force du Rêve Eveillé Libre qui permet d’effectuer un travail en profondeur tout en respectant votre rythme.
Un travail de renforcement du narcissisme est souvent nécessaire également. En ayant d’avantage confiance en soi, il est plus facile de gérer ses envies, ses désirs et d’y faire face avec discernement et en accord avec ses propres valeurs et non plus uniquement celles imposées par la société.
Mieux comprendre la culpabilité grâce à la psychanalyse
L’idée de cette vision par la psychanalyse est d’expliquer les processus inconscients qui mènent à la culpabilité. J’ai voulu dans un souci de vulgarisation, faire simple en résumant les pensées de Freud et Lacan à ce sujet.
Freud, dans son œuvre relie la culpabilité à la découverte du plaisir chez l’enfant, alors même qu’il n’est pas sensé être en âge d’en éprouver. Il le relie à l’autopunition et à la honte face à l’interdit. On pourrait qualifier le sentiment de culpabilité comme un système d’autodéfense face à ce que Freud nomme la pulsion. Il expliquera que le Moi a cette capacité à se « scinder » en deux parties : le narcissisme et l’idéal du moi, dont la deuxième surveille la première. Plus tard il formulera la notion de surmoi dans, « Pour introduire le narcissisme », en tant que modèle. Il est le gardien des idéaux parentaux hérités du complexe d’Œdipe et il suppose, en tant que garant de la morale, une intériorisation de l’agressivité et de l’autorité. Reste cette ambivalence constante entre expression de la pulsion (agressivité, transgression de l’interdit) et besoin d’amour, pulsion de vie, pulsion de mort.
« La tension née entre le Sur-moi et le Moi qui si il s’est soumis, nous l’appelons sentiment de culpabilité ; elle se manifeste sous la forme du besoin de punition »
S. Freud, ibid., p. 80.
Pour Lacan, la culpabilité naît la plupart du temps d’un interdit ou d’un désir auquel on a cédé.
« Je propose que la seule chose dont on puisse être coupable, au moins dans la perspective analytique, c’est d’avoir cédé sur son désir ».
Lacan, Le Séminaire, livre VII, séance du 29 juin 1960.
Il associe la culpabilité au complexe de castration dont résulte la confrontation de l’individu au désir de l’Autre. Ce qui passe par le langage.
Il distingue deux types de culpabilité :
- La culpabilité névrotique : En souhaitant prendre sur soi la charge de la faute, elle consiste à sauver l’Autre, en s’y substituant. La culpabilité porte alors sur l’incapacité du moi à incarner cette substitution (phallus).
- La culpabilité mélancolique : Par manque de narcissisme, l’individu se dépossède de tout ce qui pourrait le faire briller auprès des autres. C’est comme si l’individu s’était dépossédé de son propre désir :
« Objet entré dans le champ du désir et qui, de son fait, ou de quelque risque qu’il a couru dans l’aventure, a disparu ».
Lacan, Ibidem, p. 463.
Il parle également de notion de prix à payer, celui de renoncer au désir. Puisque l’individu est impuissant à retenir le désir, cela ne le rendrait-il pas coupable d’une faute qu’il doive payer sans pour avoir conscience de cette faute ?
En conclusion, on pourrait dire que la culpabilité est un sentiment profondément humain. Son existence est à la fois une des meilleurs garantes de la morale, indispensable pour vivre en société et à la fois une des sources les plus importantes de la névroses, en ce sens qu’elle enferme l’individu dans un carcan qui l’empêche à aller vers l’Autre. Comme bien souvent, tout est une histoire d’équilibre.
Voici quelques articles complémentaires pour ceux qui voudraient aller plus loin dans la compréhension de la culpabilité :